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Enfin, I'affaire du sang contamine plongea
tout le monde dans le plus grand desarroi.
II n'etait plus question seulement qu'a I'ere
de la communication, I'Etat couvre,
masque ou subisse les derives, les exces,
les denaturations de celle-ci. II s'agissait de
I'emergence d'un phenomene insense, au
coaur meme des relations entre I'Etat et les
citoyens et de la communication qu'ils
impliquent. line sorte de regression vers
les tenebres, alors que tout le discours
mass mediatique portait ingenument sur les
progres lumineux que la communication
promettait. Rien n'avait fonctionne entre
scientifiques, medecins, patients, pouvoirs
publics et medias, et des milliers de gens
se sont vus communiquer une maladie
incurable par I'imperitie d'un organisme
public.
Le graphisme n'est ni un remede social ni
une ideologic. Le Centre national de la
transfusion sanguine, avec la reputation
dont il beneficiait jusqu'a il y a peu, pouvait
faire ce qu'il voulait en matiere de commu
nication visuelle et, notamment, demander
aux meilleurs graphistes de forger son
identite... Tous se seraient precipites (il y
eut d'ailleurs une tentative dans ce sens, en
1980, quand le CNTS fit plancher sur son
image des etudiants du dernier cycle de
I'ecole nationale superieure des Arts
Decoratifs). Si tel avait ete le cas, I'identite
et I'image meme des graphistes qui
I'auraient commise, eussent ete prises dans
la tourmente car on ne peut guere envisa-
ger la recherche de la ligne graphique
devoilant, dejouant comme une enquete
de Philipp Marlowe les mecanismes de
la tragedie.
Pourtant, le graphisme, pratique eminem-
ment sociale, souvent revelatrice des
manques et des dysfonctionnements, a un
role deontologique important a jouer, parti-
culierement dans le cadre de la production
des images de I'Etat. Certains politiques
ont conclu de I'affaire du sang contamine
qu'il serait souhaitable qu'au sein meme
des pouvoirs publics soient mis en place
des organismes de controle independants,
capables d'alerter I'opinion. On peut trou-
ver I'idee utopique mais si ces «contre
feux devaient voir le jour, des profession-
nels du graphisme auraient leur place dans
des instances chargees d'observer la com
munication.
L'information
En France, le terme communiquer qui, ety-
mologiquement, signifie transmettre, est
largement galvaude alors que celui d'infor-
mer, dont I'essence est «donner une
formedemeure globalement reserve aux
media de presse. Le partage et la mise en
forme de I'expression, le souci constant de
I'image, de sa qualite et de son bon rapport
au texte sont les axiomes de I'intervention
graphique et les conditions de sa reussite.
Cette demarche est informative" et la
communication qui en decoule ne peut
etre, en quelque sorte, que consubstantiel-
le, en tout cas rapportee a sa juste mesure.
Pour bien comprendre la nature informative
du graphisme, mieux vaut se referer a de
petites experiences de laboratoire, quasi-
imperceptibles dans le bruissement media
tique, qui fleurent bon I'artisanat et la
decouverte sans tapage.
Des interventions graphiques dans de
petites villes comme Dieppe et Saumur,
sont a cet egard (quasiment) exemplaires.
Deux villes qui ont en commun une tren-
taine de milliers d'habitants chacune, d'etre
au bord de I'eau (la Manche, la Loire),
d'avoir connu un fait d'armes glorieux mais
voue a I'echec lors de la derniere guerre (le
debarquement anglo-canadien, la resistan
ce des cadets) et... de s'etre adressees a
un atelier graphique pour forger leur identi
te visuelle. Nous Travaillons Ensemble
(NTE) a Dieppe, integral Concept a Saumur.
Dans les deux cas, un dialogue direct s'eta-
blit avec le maire, qui permit de preciser
d'abord la duree de I'intervention.
enfer pave de bonnes intentions pour les
graphistes, ou I'oeil est rive sur le calendrier
electoral. La commande publique est alors
mal formulee, pour ne pas dire debilitante,
chargee de sous-entendus, et rien de soli-
de ne peut etre mis en place qui ne soit lie
au retour du bulletin de vote».
Sans reperes clairement etablis sur la natu
re des images et le role d'une intervention
visuelle, les equipes municipales penchent
naturellement vers la propagande, et le gra-
phiste ne peut que «sauver les meubles, en
tentant de reduire la demagogie au mini
mum", dixit Alex Jordan. Toutefois, c'est
sans doute dans les villes (ou le court-cir-
cuitage du politique est le plus flagrant),
que I'intervention graphique donnera plei-
nement la mesure de ses qualites. Dans
ces molecules de la citoyennete», le signe
comme «atome civique» poursuit la
recherche d'un authentique droit de cite.
I La typographic
Rotis sans serif
Rotis sans serif bold
Rotis sans serif extra bold
Rotis semisans
Rotis semisans bold
Rotis semisans extra bold
Rotis semi serif
Rotis semi serif bold
Rotis serif
Rotis serif bold
Dans ces deux microcosmes urbains a la
relative stabilite politique, I'intervention gra
phique a pu s'accomplir hors des calculs
d'interets politiques primaires. Pour les gra
phistes, il ne s'agit pas en I'occurrence de
revendiquer une improbable stabilite poli
tique comme condition de leur intervention,
mais bien de faire admettre que celle-ci
puisse depasser un mandat, une equipe,
et qu'elle soit acceptee comme une forme
d'urbanisation visuelleselon Rued! Baur.
Fort heureusement Dieppe et Saumur ne
sont pas les exceptions qui confirment la
regie et beaucoup d'autres exemples
seraient a mettre en exergue, au demeurant
le territoire des villes est trap souvent un
Extrait d'acte de tnariage
1'autre part.
de
et de